J’ai souhaité faire cette interview avec mon amie Amande, non pas seulement pour promouvoir son premier film, mais également pour apporter le témoignage d’une femme qui comme beaucoup d’entre nous a longtemps cherché sa voie. Je l’ai vue se triturer les méninges, se torturer sur la prise de décisions et s’angoisser à propos de ses choix de vie. Nous sommes toutes Amande. Sauf que ça y est, elle s’est enfin lancée, elle. Et je ne pouvais pas être plus fière d’elle. D’ailleurs grâce à elle, j’aurai peut-être moi aussi l’opportunité de réaliser l’un de mes plus vieux rêves de devenir actrice. Je compte sur toi Amande. Quant à vous, lisez donc son portrait juste ici.

Coucou amande, peux-tu nous parler de toi et de ton parcours ?

Mon parcours n’a pas vraiment la forme d’une ligne droite, comme beaucoup de personnes de mon âge j’imagine ! Après mon bac je suis allée à la fac où j’ai commencé des études en médiation culturelle sans trop savoir où ça allait me mener (pour ceux qui se demande, c’est une branche un peu fourre-tout qui permet de travailler dans un peu tous les domaines culturels, plutôt du côté de l’administration ou de l’organisation).

La paperasse de l’administration culturelle m’a fait fuir et j’ai décidé de reprendre mes études pour faire ce que j’ai toujours voulu faire : du cinéma.

En master 1 je suis partie en Erasmus en Italie pendant un an, puis une fois mon Master en poche, j’y suis retournée et j’ai vécu deux ans à Milan où j’enseignais le français. Petit à petit, vivre à l’étranger s’est avéré de plus en plus frustrant pour moi et je suis rentrée en France. J’ai utilisé mon diplôme et j’ai travaillé deux ans pour une compagnie de théâtre jeune public. La paperasse de l’administration culturelle m’a finalement fait fuir et j’ai décidé de reprendre mes études pour faire ce que j’ai toujours voulu faire : du cinéma ! Et voilà, à 28 ans je suis en deuxième année dans une école à Lyon où je me forme en réalisation et en montage.

Quels sont 3 moments dans ta vie qui t’ont marquée ?

  • Le moment où je suis partie en Erasmus. Ça m’a libéré d’un poids terrible, c’était vraiment une année d’insouciance, de rencontres et de découverte.
  • Le moment où en première année de fac, un professeur m’a dit que j’avais du talent pour l’écriture. Je pense qu’il n’a jamais su à quel point ça m’a marqué et ça a marqué la manière dont je me voyais à l’époque.
  • L’année dernière, le moment où j’ai commencé à faire de la photo. Alors que j’avais un reflex depuis des années que j’avais à peine touché, j’ai finalement pris le temps de comprendre comment il marchait et j’ai commencé à prendre les photos que j’avais en tête. Elles sont d’ailleurs sur Instagram.

Quelle est la chose la plus folle que tu aies jamais faite ? 

photo d'Amande

Partir sur des coups de tête. Je suis partie en Erasmus sur un coup de tête, j’avais choisi la destination presque au hasard et je me suis retrouvée dans un village dans les collines du centre de l’Italie. Je suis repartie à Milan en m’inscrivant à la dernière minute à une annonce, je suis rentrée en France de la même manière. Pareil quand j’ai déménagé de Paris à Lyon, ça s’est fait au dernier moment !

Qu’est ce qui t’a lancé dans le cinéma ?

J’ai toujours aimé le cinéma mais je me suis retenue d’aller dans cette direction pendant très longtemps. Je pensais que c’était juste un rêve inatteignable, qu’au pire je pouvais être cinéphile et que ça m’irait très bien. Et puis j’ai jamais réussi à penser à autre chose finalement. Quoi que je faisais je me retrouvais toujours à penser à cette carrière fantôme que, dans une autre vie, j’aurais aimé avoir. Au bout d’un moment ça n’a plus été tenable, et je me suis lancée ! 

J’aime tous les genres au cinéma, mais ce qui me plaît le plus je pense que ce sont les films et les réalisateurs qui oscillent entre la comédie et le poétique, qui tendent vers la mélancolie, le rêve, comme Wes Anderson, Bruno Podalydes, Jim Jarmush, Valérie Donzelli, Jacques Tati, Sofia Coppola, Michel Gondry, Federico Fellini, Céline Sciamma… Bon la liste est longue… J’ai moins de noms de femmes en tête étrangement.

Justement en parlant de femmes, comment devient-on réalisatrice ?

C’est difficile de répondre à ces questions… Tout d’abord parce que je ne me considère pas vraiment encore comme une réalisatrice pour le moment et puis parce qu’il n’existe pas un seul moyen d’arriver là où on veut. C’est plus facile quand on sort d’une grande école, mais sinon c’est vraiment une histoire de persévérance et de réseau. Le savoir-faire et les idées sont importants mais pas autant que se faire des contacts et montrer son travail.

J’ai vraiment repoussé le moment de faire des études dans ce domaine puis d’écrire des scénarios parce que je pensais que moi je n’y arriverais jamais.

Pour ce qui est de vouloir réaliser quand on est une femme : je ne vais parler ici que de mon ressenti personnel. J’espère bien que tout le monde ne ressent pas la même chose que moi. Moi, je sens que ce « manque de représentativité » dans le domaine du cinéma m’a inconsciemment un peu entravé. Je mets des guillemets car « manque de représentativité » ça n’est pas tout à fait l’expression juste.

Il y a des réalisatrices géniales partout dans le monde, mais force est de constater que dès qu’on pense aux grands noms du cinéma on pense à des hommes, (par exemple Spielbert, Coppola, Tarantino, … ). Les femmes viennent après, en y réfléchissant. J’ai vraiment repoussé le moment de faire des études dans ce domaine puis d’écrire des scénarios parce que je pensais que moi je n’y arriverais jamais ; sans savoir vraiment d’où me venait cette idée.

Statues Mouvantes : un court-métrage inspiré du confinement

Genre : Déambulation poétique dans la ville

Synopsis:

Comme chaque matin Jojo part travailler. Alors qu’il se prépare à passer une journée dans sa routine habituelle, une rencontre inattendue vient bouleverser ses plans.
A l’occasion d’une déambulation introspective à travers la ville à la rencontre de toute sorte de personnages, une réflexion autour du mouvement et de l’immobilité s’esquisse en plus d’une question sans réponse: « Est-ce parce qu’on ne bouge pas que l’on est inutile ? ».

Parle-nous de ton court-métrage Statues Mouvantes. Comment as-tu pensé à ce scénario ?

J’ai déjà réalisé un film sur le corps féminin avec Julie Raab. Mais Statues Mouvantes est le premier que je réalise seule, donc bien sûr je l’aime beaucoup, mais je vois aussi ses défauts… Et j’en tiendrais compte pour ma prochaine réalisation. J’ai écrit le scénario pendant le confinement. À l’époque on était encore sûr de rien, on ne savait pas si on allait être autorisé à tourner ou pas. Du coup j’ai imaginé une histoire où il y aurait le moins d’acteurs physiques possibles sur le tournage mais où il y aurait quand même pleins de personnages différents.

Est-ce parce qu’on ne bouge pas qu’on est inutile ? Et le mouvement nous rend-il libre ?

C’est comme ça que l’idée de faire parler des statues m’est venue. Finalement il y a onze personnages mais je n’ai filmé que deux acteurs ! Les statues, c’était aussi une métaphore de la période qu’on était en train de vivre et ça pouvait véhiculer des idées qui m’interrogeaient beaucoup comme : est-ce parce qu’on ne bouge pas qu’on est inutile ? Et le mouvement nous rend-il libre ? Ces interrogations traversent le film et font réfléchir le héros sur son propre rapport à la vie et, en sous texte, sur ses choix professionnels (qui est un thème qui m’intéresse aussi beaucoup !).

Du coup, ça fait quoi d’être derrière la caméra ? 

C’est du stress, mais du bon stress. C’est hyper satisfaisant de voir ce que tu as imaginé pendant des semaines voir des mois prendre vie ! Après, des fois ça ne marche pas du tout à l’écran et c’est frustrant, mais l’expérimentation est quand même toujours intéressante.

Comment imagines-tu ton prochain film ?

J’ai plusieurs scénario en cours d’écriture, je viens de démarrer un tournage et je travaille beaucoup autour de l’idée du doute et de la prise de décision en ce moment. Ça déteint un peu sur mon état mental, c’est dur d’arrêter de douter de soi quand on créé quelque chose. Mais je dirais qu’il faut arrêter de se battre contre ses propres envies (même si ce n’est pas facile) !

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